Tout au long de l’année nous avons colporté le manifeste du « cinéma léopard.e ». C’est depuis cette position que nous avons invité des gens à des rencontres d’été, « les conspirantes ». Nous avions comme simple ambition de trouver des camarades avec qui penser politiquement le cinéma. Ces rencontres ont eu lieu et, de notre point de vue, elles furent joyeuses et enthousiasmantes.

Nous avons accueilli 24 personnes dans un hameau ami, organisé une cuisine collective et un banquet entre les arbres ; un dortoir et un camping. S’il y avait bien quelques « petits groupes dans le groupe » et des liens préexistants, des gens sont venus seuls et il y a eu des mélanges. Dans une grange transformée en cinéma, nous regardions des séquences de rushs issus de films en cours de fabrication réalisés par des personnes présentes. Après le repas nous regardions les films réalisés par les un.e.s et les autres et le dernier soir, nous avons fait une boom de qualité.

Le lundi matin, beaucoup ont dû partir et nous n’avons pas eu le temps de faire un vrai retour collectif du week-end mais, ayant parlé entre nous-les-organisateur.ices, voilà une partie de ce qu’on s’est dit.

Nous avons été heureu.x.ses de constater la diversité de rapports au cinéma des personnes présentes : certain.e.s sont théoricien.ne.s, d’autres praticien.ne.s, certain.e.s sont plus en marge d’autres plus dans le jeu institutionnel, certain.e.s sont réal de docu, d’autres techniciens, une personne venait de la fiction, certain.e.s de la vidéo etc.

Ces différents horizons ont enrichi les rencontres. Nous remarquons qu’au lieu de cristalliser des conflits idéologiques, nous avons eu l’intelligence collective de chercher la composition et la compréhension critique. Nous avions à cœur de parler politiquement du cinéma et pas de « politique », cette ligne a été plutôt bien suivi durant ces quelques jours et sa réussite valide à nos yeux sa pertinence : ne pas s’écharper sur des questions morales ou dogmatiques mais au contraire creuser collectivement un rapport au cinéma et à la politique depuis des endroits différents.

Dans ce sens le meilleur moment pour nous a été le partage de rushes de l’après-midi. Parler d’un film en cours est un exercice difficile, qui nécessite d’accepter de livrer le film dans ses imperfections, ses tâtonnements, ses ratés, de le sortir de l’enveloppe confidentielle et protectrice du « en cours », d’accepter que par des regards extérieurs il quitte des chemins qu’on pensait tracés et s’ouvre à des ailleurs desquels nous n’avions pas pensé. La beauté du moment tient alors à la qualité d’écoute, d’attention qui émane du groupe. Certes perfectible, on l’a trouvé dense, sincère.

Sans faire de synthèse de toutes nos discussions, voilà ce que nous retenons en ce qui concerne l’avenir :

* D’abord, nous avons explicité l’intention de constituer un « groupe action » pour que le cinéma léopard.e soit une communauté vers laquelle se tourner pour intervenir publiquement dans le champ du cinéma sous la forme d’écrits ou d’actions directes.

* En ce qui concerne les projections, nous proposons à toustes les membres du cinéma léopard.e de réaliser des RDV léopard.e.s en suivant un protocole commun : y inviter les autres léopard.e.s (+ leurs potes et leur.e.s futur.e.s potes) via une liste mail, distribuer le texte manifeste et chercher d’une manière ou d’une autre de saboter la bienséance, créer des discussions et permettre des rencontres.

* Nous avons proposé de faire un blog où retrouver nos textes, se partager des critiques de films et les prochains rendez-vous. Un site sur lequel pourrait également être archivé les différentes actions et projections revendiquées.

* L’idée a été retenu de faire une rencontre léopard.e par saison. La première rencontre d’automne pourrait se faire en marge de la fameuse semaine asymétrique du Polygone étoilé qui aura probablement lieu à Marseille Du 27 novembre au 3 décembre 2023. Les modalités de cette rencontre sont encore à préciser et seront explicités sur place. L’équipe belge se propose également d’organiser une rencontre prochainement à Bruxelles.

Chaque rencontre est l’occasion de s’écrire une lettre comme celle ci, une façon de se tenir au courant de ce qui se passe dans l’espace.

Paris, été 2023. A vous, grrr,

Gui, riri, ella, bilou, lolo